Au Brésil,
on dit que l'année commence après le Carnaval! Dans mon cas, c'est avéré car,
après un silence de plusieurs semaines, me voici
de retour après avoir plongé dans la folie du Carnaval brésilien! Et quand je vous dis Carnaval Brésilien, je ne parle pas que du Carnaval de
Rio qui a eu lieu le week-end dernier!
Notre marathon a commencé le 2 février à Vitoria...
Jour de mon
anniversaire, date de la commémoration de Jemanja et du défilé au
Sambodrome. Pour cela j'ai organisé une "chapelle de Carnaval" façon carnaval
de Dunkerque où nous avons chanté les chants du carnaval dunkerquois traduits
en portugais pour nos amis puis nous sommes allés au Sambodrome soutenir
la Mocidade Unida da Gloria (MUG), la cinquième à passer aux alentours de
3h du matin!
La première école à défiler sur l'Avenue, Piedade a commencé fort avec un
hommage à tous les peuples d'Espirito Santo : les indiens, mais aussi les
allemands, les suisses, les italiens…puis un hommage à toutes les richesses
humaines, naturelles et économiques d’Espirito Santo. Il n’y a que les
Brésiliens pour réussi à me faire rêver en faisant défiler des bavarois
emplumés !
Imperatriz a quant à elle réalisé un
spectacle familial, un hommage au Parc Moscoso. Cette école m’a touchée pour la
bonne ambiance, la diversité des participants, y compris les enfants et par la
proximité du thème choisi avec notre quotidien. L’école nous a surpris en nous
offrant un carnaval dans le carnaval : une ala ("un tableau") complète d’habitants avec
leurs habits de carnaval…de quoi rappeler Dunkerque !
Ensuite, Boa Vista a allumé le
public avec leur Samba enredo (la musique) ! Sur le thème de l’Afrique, de l’abolition
de l’esclavage et la fierté noire, cette école a témoigné d’un très haut niveau
de qualité technique et artistique, mais surtout d’une grande interaction avec
le public, un vrai talent à rassembler et à fédérer !
Enfin la MUG a émerveillé tout le
monde avec les chars, les costumes, les chorégraphies! Celle qui a probablement
laissé le plus de spectateurs perplexes : cette école prestigieuse avait
choisi de rendre hommage à Dunkerque, cette ville du nord de la France connue
pour son vibrant carnaval et son corsaire, Jean Bart…et totalement inconnue ici
au Brésil !
C'est cette école que j'ai suivie
depuis plus de six mois, en allant régulièrement aux "ensaios"
(répétitions) du dimanche soir. Imaginez ma fierté d'entendre les Brésiliens
chanter le coeur serré un hymne à la Cité de Jean Bart! de quoi faire pleurer
Cô Pinard où il est!
Les capixabas (habitants de Vitoria) nous ont offert une
création originale, surprenante, décalée…différente de tout ce que l'on a pu voir
avant! Après l'ouverture du défilé par Gracienne Damman, élue de
Dunkerque, on a ainsi vu passer les chars allégoriques représentant la mer, un
bateau de corsaires, des cabines de plage, la folie du carnaval et de ses
masques et un Jean Bart baroque! Quant aux
différents tableaux, ils nous ont rappelé la pêche à Islande, l’occupation
espagnole, hollandaise, anglaise, les corsaires, la révolution française, la
belle époque… Au delà de l'hommage à la cité de Jean Bart, nous avons vu un
hommage vibrant et énergique à la France!
Le jour même et les jours qui ont suivi les résultats, le choix de la MUG a été fortement discuté: enthousiasme et satisfaction, fierté de voir cette école rigoureuse et audacieuse remporter le prix le plus prestigieux, mais aussi critique, incompréhension, jalousie: quelle est cette ville française inconnue, Dunkerque, qui a été citée? Combien a-t-elle payé pour gagner? C'est terrible, mais je trouverai à un autre moment l'occasion de répondre aux critiques, en portugais!
Pour les amateurs, qui auraient envie de profiter du Carnaval 2014 pour découvrir Vitoria, voici le prix des places:
- Prix des places pour le groupe spécial: 35 reais
- Prix des places groupe d'accès: gratuit
- Prix des costumes pour défiler: environ 150 à 220 reais avec la MUG
Le 7 février, direction Rio...
Nous avions nos places en arquibancadas (gradins) pour les 4 défilés: les deux défilés du groupe d'accès (20 reais par personne secteur 9 avec places marquées) et les deux défilés du groupe spécial (30 reais par personne, secteur 13, en face de la dispersion).
Nous avions nos places en arquibancadas (gradins) pour les 4 défilés: les deux défilés du groupe d'accès (20 reais par personne secteur 9 avec places marquées) et les deux défilés du groupe spécial (30 reais par personne, secteur 13, en face de la dispersion).
C'était magnifique. On ne s'est pas ennuyés un seul instant. Nous avions appris les sambas enredos, nous avons tenté de décrypter chacun des chars ou des costumes...aidés par le petit livret fourni à l'entrée.
Là aussi, nous avons eu un coup de coeur pour les écoles ayant pris le plus de risques: Tijuca bien sûr et son carnavalesco Paulo Barros qui ont rendu hommage à Thor et à l'Allemagne en incluant des tours de magie et des numéros de voltige; Beija Flor et un thème très librement adapté sur les chevaux; Mocidade et le festival Rock in Rio; Grande Rio et le pétrole; São Clemente et les grandes novelas historiques et bien sûr nous avons été très émus au passage de Vila Isabel: délicat, élégant, soigné, fin...très enchanteur.
Grand plaisir aussi au passage de la batterie de Portela, aux sonorités très afro-brésiliennes, aux bossas entraînantes...Par la suite,j'ai su que des copines lilloises d'Atabak étaient dans le défilé!
Grand plaisir aussi au passage de la batterie de Portela, aux sonorités très afro-brésiliennes, aux bossas entraînantes...Par la suite,j'ai su que des copines lilloises d'Atabak étaient dans le défilé!
Alors que la favorite Beija Flor est apparue très glamour et bling bling (pour mon grand bonheur car j'ai vu en vrai Morena et Livia Marini, la gentille et la méchante de la novela du moment!), Vila Isabel a dévoilé un spectacle très raffiné, abouti, noble dans le choix des tissus et des chars et précis dans la progression du défilé. C'est cette école, qui a défilé en dernier sur le coup de 4h de matin le dernier jour qui a remporté le concours du Grupo Especial.
J'ai été étonnée de voir les nombreuses références à la France dans les différentes écoles: références aux rois de France, à la gastronomie, à la colonisation française dans le Nordeste et à la Belle Epoque qui a inspiré beaucoup de villes brésiliennes dans leur architecture et leurs jardins...
On a tremblé durant le défilé: chars qui bloquent, qui ne passent pas, personnes sur les chars qui s'évanouissent, départs de feu, retards...c'est terrible, plein d'émotion. J'avais lu qu'à São Paulo une personne était décédée sur son char...j'ai tremblé à Rio en voyant les secours intervenir et descendre une personne inconsciente.
Même si au fond de nous nous soutenions Vila Isabel (c'est l'école du quartier où vit notre famille), nous avons soutenu chaque école, impressionnés par l'énergie collective, l'émotion, la qualité du travail: enredo, batterie, déguisements, chars allégoriques...
Etant donné que j'avais assisté aux ensaios de la MUG à Vitoria, j'ai pu vivre avec chaque école l'émotion avant, pendant et après le défilé! De plus, assister au Carnaval est un cours accéléré sur la culture brésilienne, ses apports, ses références, la construction de son identité nationale; ça m'a fait plaisir de voir les nombreuses références aux vagues d'immigration (j'ai appris qu'il y a avait eu une immigration coréenne!) et au peuplement originel du Brésil...Je rêve qu'en France on fasse la même chose en vantant les "effets positifs de l'immigration"!
L'avantage du secteur 13 est d'assister à la fin du défilé: alors que le compteur s'arrête, la batterie et les danseurs continuent la musique en interaction avec le public...ça prolonge le plaisir...A cet endroit du Sambodrome on voit passer de près toutes les stars aussi (ah....Vanubia, Lurdinha et Livia Marini encore!).
Petite remarque aussi sur l'architecture du sambodrome: c'est très grand...75 000 personnes et à chaque endroit une vue imprenable, et une frénésie collective qui se diffuse et se partage. Un bémol sur les aménagements à la sortie: pour prendre le bus, on passe par des endroits non aménagés, tous les flux de transports se mélangent: piétons, voitures, taxis et bus...ça sent le pipi, on a les pieds mouillés et on ne préfère pas savoir pourquoi!
Une fois ce mauvais moment passé, ça va! Mais là je me suis dit que Niemeyer, même s'il était architecte de génie, n'était pas un grand urbaniste!
De la tristesse aussi à la fin de chaque défilé en voyant les camions de ramassage d'ordures emportant les déguisements l'issue du passage des artistes...très triste...cela mériterait tellement d'être recyclé, revendu, donné...! Cependant j'ai lu que certaines écoles, dont Vila Isabel s'étaient engagées dans un projet de développement durable, tant pour la production des déguisements et des chars, que pour la limitation des déchets et leur recyclage. Il n'y a que des avantages à s'engager dans ce type de démarche, et on a pu voir des costumes composés de chutes de tissus très nobles, de grande qualité alors que d'autres écoles sont désormais contraintes d'importer des tissus de Chine, meilleur marché que les tissus brésiliens.
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